Il ne s’est pas contenté de parler luxe. Lors de l’assemblée générale de LVMH ce jeudi, Bernard Arnault a décoché une salve inattendue contre l’Union européenne, en appelant à la création d’une zone de libre-échange entre l’Europe et les États-Unis. Dans un contexte de tensions commerciales ravivées par le retour de Donald Trump à la Maison-Blanche, le patron du géant du luxe plaide pour une approche pragmatique. Et critique frontalement une bureaucratie européenne qu’il juge inefficace.
L’enjeu est de taille pour LVMH. À l’heure où les nouveaux droits de douane américains menacent les exportations françaises, le PDG s’inquiète : sans accord rapide entre Bruxelles et Washington, certaines productions du groupe pourraient être déplacées aux États-Unis. Une perspective lourde de conséquences, et qui alimente un discours désormais très politique de la part de l’homme d’affaires.
Une critique frontale de la machine européenne
Devant ses actionnaires, Bernard Arnault n’a pas mâché ses mots. Selon lui, « l’Union européenne n’est pas dirigée par un pouvoir politique, mais par un pouvoir bureaucratique qui passe son temps à éditer des réglementations », rendant toute négociation avec Washington « pas facile ». Son message est clair : tant que Bruxelles restera empêtrée dans ses normes, les entreprises seront pénalisées dans la guerre commerciale en cours.
À ses yeux, la solution ne peut venir que d’un changement d’approche. Il appelle les dirigeants des États membres à reprendre la main sur les discussions avec les États-Unis, jugeant les Britanniques « plus concrets » et avancés dans leurs tractations. En creux, c’est une remise en cause de la légitimité même de la Commission européenne qu’il opère, en mettant en avant une forme d'impuissance diplomatique.
Une guerre commerciale qui cible le luxe et la viticulture
Le retour de Donald Trump à la tête des États-Unis a relancé l’instauration de droits de douane punitifs visant certains produits européens. Dans sa ligne de mire : les vins français, les sacs de luxe, les parfums… autant de produits phares du catalogue LVMH. Pour Bernard Arnault, le risque est clair : « Si les négociations échouent, nous serons forcément amenés à augmenter nos productions américaines. »
Il en va, selon lui, de la survie de filières entières. Il évoque la viticulture, déjà sous pression, et appelle à une issue rapide « à l’amiable ». Sa crainte ? Que les entreprises soient rendues responsables de décisions politiques. « Ce ne sera pas la faute des entreprises, ce sera la faute de Bruxelles si cela devait arriver », a-t-il martelé.
Une vision partagée par Elon Musk… et peut-être Washington ?
L’homme le plus riche d’Europe n’est pas seul à défendre cette idée. Début avril, Elon Musk, désormais proche de l’administration Trump, s’est aussi dit favorable à une « zone de libre-échange entre l’Europe et l’Amérique du Nord, avec des droits de douane nuls ». Une proposition qui trouve un certain écho des deux côtés de l’Atlantique.
Bruxelles, de son côté, tente de garder la main. La présidente de la Commission, Ursula von der Leyen, a proposé début avril une exemption totale de droits de douane pour les produits industriels échangés avec les États-Unis. Mais l’initiative reste fragile, d’autant que les négociations se concentrent principalement sur l’industrie automobile allemande.
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Pour Bernard Arnault, il est temps d’élargir la focale : « Pour la viticulture française, c’est vital », a-t-il insisté. À travers cet appel, il tente non seulement de préserver son empire, mais aussi de redessiner les contours du commerce transatlantique, avec ou sans Bruxelles.
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