Le Roi du Maroc, Mohammed VI, a lancé, ce jeudi 24 avril 2025 depuis Rabat, l’un de ses projets d’infrastructure les plus ambitieux depuis une décennie : l’extension de sa ligne à grande vitesse (LGV) de Kénitra à Marrakech. Cette nouvelle phase, longue de 430 kilomètres, s’inscrit dans un programme global d’investissement estimé à 96 milliards de dirhams, soit près de 10 milliards d’euros. Avec cette initiative, le royaume consolide sa position unique sur le continent africain : celle du seul pays disposant d’une LGV en service, et désormais en extension.
Une infrastructure au service d’une stratégie nationale
En reliant Kénitra à Marrakech via Rabat et Casablanca, cette ligne à grande vitesse permettra de réduire de manière significative les temps de trajet à travers les principaux pôles économiques et touristiques du pays. Tanger-Marrakech se fera désormais en 2h40 contre près de 5 heures aujourd’hui. Rabat pourra être reliée à l’aéroport Mohammed V de Casablanca en 35 minutes. La desserte du futur grand stade de Benslimane est également prévue.
Ce projet, officiellement lancé par le roi Mohammed VI depuis la gare de Rabat-Agdal, traduit une vision stratégique de la mobilité : rendre le transport collectif plus rapide, plus propre, et plus accessible dans un contexte de forte urbanisation et de transition énergétique.
Coopération avec la France
Le lancement de cette nouvelle LGV n’est pas un geste isolé. Il prolonge des engagements pris lors de la visite d’État d’Emmanuel Macron au Maroc en octobre 2024. À cette occasion, plusieurs accords structurants ont été signés, notamment dans le domaine ferroviaire. Le groupe Alstom fournira les rames à grande vitesse, tandis que des mécanismes de financement conjoints ont été convenus pour soutenir l’extension du réseau.
Cette coopération franco-marocaine réaffirme l’alignement stratégique entre Rabat et Paris sur les enjeux d’infrastructure durable, de co-industrialisation et de mobilité verte.
Un levier d’industrialisation et de souveraineté technologique
Au-delà des infrastructures, le projet sert également de catalyseur industriel. Il prévoit la mise en place d’une unité de fabrication de trains au Maroc, avec un objectif d’intégration locale supérieur à 40 %. Une joint-venture entre l’ONCF et les constructeurs permettra d’assurer la maintenance des trains sur toute leur durée de vie. Cette approche vise à consolider une filière ferroviaire nationale, créatrice d’emplois et génératrice de savoir-faire.
Par ailleurs, l’acquisition de 168 nouveaux trains — pour un montant de 29 milliards de dirhams — permettra à la fois de rajeunir le parc existant et de répondre à la hausse attendue du trafic. Cela inclut 18 rames à grande vitesse, 40 trains inter-villes, 60 trains navettes rapides (TNR) et 50 pour les réseaux de transport métropolitain.
Mobilité urbaine et durabilité
L’extension de la LGV aura pour effet secondaire vertueux de libérer de la capacité sur les lignes classiques. Cela ouvre la voie au développement de trains métropolitains de proximité dans les grandes agglomérations, notamment Casablanca, Rabat et Marrakech. Ces services ferroviaires urbains pourraient significativement améliorer les conditions de transport dans des villes marquées par la congestion routière et les émissions de gaz à effet de serre.
Ce volet renforce la composante environnementale du projet : le ferroviaire est aujourd’hui considéré comme l’un des moyens de transport les plus sobres en carbone. Il s’inscrit ainsi pleinement dans la stratégie marocaine de réduction des émissions, et dans les engagements du pays au titre de l’Accord de Paris.
Une ambition africaine affirmée
Avec cette nouvelle phase, le Maroc ne cherche pas uniquement à moderniser son propre réseau. Il se positionne également comme un modèle exportable pour le continent. Plusieurs pays africains ont manifesté leur intérêt pour l’expérience marocaine, et l’ONCF joue d’ores et déjà un rôle de conseil auprès d’autorités ferroviaires en Afrique de l’Ouest.
Cette projection s’inscrit dans une logique d’influence douce : à travers la technologie, la formation et l’expertise, le Maroc affirme son rôle d’architecte de solutions africaines en matière d’infrastructure.
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