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Keynésianisme, inégalités, pourvoir d'achat et spéculation

Par Loïc Abadie

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Seuls des ministres de l'économie, des secrétaires d'état au Trésor, des adeptes du Père Noël ou du socialisme (ainsi que quelques prix Nobel d'économie qui les inspirent) peuvent croire qu'imprimer des morceaux de papier portant une inscription du type « 100$ » ou « 100€ », pour les distribuer ensuite à la population améliorera le pouvoir d'achat de celle-ci et créera de la richesse à partir de rien.

Si cela était vrai, la première économie mondiale serait le Zimbabwe, qui est l'aboutissement ultime du Keynésianisme. Là-bas, pour reprendre une expression du nouvel économiste tendance du moment (Paul Krugman), on n'est pas « angoissé du déficit » et on n'a pas peur d'enchaîner les plans de relance. On y imprime des $ zimbabweens par milliards, avec une inflation qui se compte en millions ou milliards de %. Le résultat ne semble pas vraiment brillant.

C'est bien entendu un exemple extrême, et il n'est pas dans mon intention d'assimiler l'Europe ou les USA au Zimbabwe. Mais inverser les valeurs et la chronologie naturelle comme le font les dirigeants actuels, c'est à dire faire passer la consommation avant la production et le travail en faisant croire qu'il suffit de consommer pour que la richesse arrive, c'est aller droit dans le mur.
Beaucoup dénoncent aujourd'hui la spéculation, et demandent une réglementation plus sévère. Plus de réglementation sur certains points (tout ce qui touche à l'expansion anarchique du crédit), je suis pour, évidemment. Mais il faudrait d'abord commencer par se demander d'où vient la spéculation !


Le prix des logements aurait-il pu monter au ciel sans une volonté délibérée des états de « relancer l'économie » par le crédit facile et les subventions en tous genre ?

Le prix des matières premières aurait-il pu flamber de 2006 à 2008 si il n'y avait pas eu au préalable une demande artificiellement boostée par la bulle immobilière dans les pays occidentaux, elle même provoquée par le crédit facile ?

Les multiples bulles d'actifs que nous avons connues auraient-elles pu se développer autant sans l'apport d'une masse de liquidités issue de la multiplication de politiques laxistes visant à entretenir une expansion de la dette à un rythme largement supérieur à celui de la création de richesses réelles ?

La floraison de créances hypothécaires à risque, de dérivés de crédit et autres produits financiers aurait-elle pu avoir lieu sans l'appui massif des dirigeants, trop heureux de trouver là un nouveau moyen de soutenir la bulle de crédit ?

La réponse à toutes ces questions est évidemment non.

Avant la crise, ce sont bien les politiques keynésiennes de soutien au crédit et de « relance » qui ont dans les faits :

- Rendu les logements et de nombreuses autres classes d'actifs de moins en moins accessibles aux classes populaires et moyennes, les logements devenant toujours plus chers.

- Provoqué une inflation qui réduit le pouvoir d'achat des ménages (nous l'avons vu lors de la flambée du prix des matières premières de 2006-2007)

- Amené des dizaines de millions de ménages américains à oublier l'importance de l'épargne, à développer une perception complètement faussée de la valeur réelle de leurs actifs et de leur patrimoine, ceux-ci se trouvant à présent démunis après que la crise ait laminé la valeur de leurs actifs.

- Amené des dizaines de millions de ménages à être ruinés par surendettement.

- Permis à des entreprises vendant des produits trop chers et inadaptés de survivre.

Le keynésianisme « fuite en avant » actuel est au final une politique profondément injuste et antisociale.

Certains responsables (en général de gauche) s'inquiètent de la montée des inégalités dans nos sociétés et accusent le « néo-libéralisme ». Sur les inégalités, ils ont entièrement raison, les inégalités ont effectivement fortement augmenté. Mais pas sur le responsable.

Pendant l'automne de Kondratieff, qui est une étape du cycle économique où la consommation est peu dynamique (les ménages sont déjà équipés et se contentent de renouveler leur biens), les salaires augmentent peu.
Dans ce contexte, les stimulations étatiques artificielles de l'économie génèrent un flot de liquidités, de « monnaie temporaire » (via l'expansion du crédit), qui dans les faits devient de plus en plus permanente, dont une grosse partie se dirige vers l'achat d'actifs patrimoniaux D'où la formation de bulles spéculatives de plus en plus grandes, les liquidités cherchant un endroit pour s'investir à n'importe quel prix... Les excès spéculatifs ne sont que la conséquence de la liquidité excessive impulsée par les états.

Le résultat : les revenus du travail progressent peu, mais la valeur des actifs patrimoniaux flambe : Ceux qui ont du patrimoine s'enrichissent encore plus (jusqu'à l'implosion finale), ceux qui n'en ont pas voient leur revenus stagner... Les inégalités augmentent, et les états tentent ensuite de corriger le problème et les dérèglements qu'ils ont eux-mêmes créés par encore plus d'impôts et une profusion de subventions et d'allocations qui arrivent bien plus dans les poches de ceux qui savent faire des grèves gênantes et sont capables de défendre leurs intérêts corporatistes que dans celles des plus démunis.

Dites merci aux « plans de relance » étatiques qui sont à l'origine du phénomène !


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