Un jeu de chaises musicales dans l’industrie automobile qui pourrait faire les affaires de Renault. La rumeur d’une fusion entre Nissan et Honda, relayée par le journal économique japonais Nikkei, bouleverse les dynamiques de l’alliance Renault-Nissan-Mitsubishi. Une éventualité qui, à première vue, pourrait sembler inquiétante pour Renault. Pourtant, cette annonce a fait bondir de plus de 5 % le cours de l’action Renault à la Bourse de Paris. Mais pourquoi un rapprochement entre deux rivaux japonais s’avère-t-il favorable au constructeur français ?
Une alliance Renault-Nissan qui s’effrite
Depuis la refonte de leur partenariat à l’automne 2023, Renault et Nissan fonctionnent sur un modèle d’alliance à géométrie variable. L’arrêt des structures communes et la baisse des participations croisées ont redéfini leurs relations. Cette nouvelle autonomie a permis à chacun de tisser de nouvelles alliances. Renault s’est tourné vers Geely et Volvo Trucks, tandis que Nissan s’est rapproché de Honda dès mars 2024.
Cependant, cette évolution a ralenti les projets communs. En Amérique latine, où des collaborations ambitieuses avaient été annoncées, les avancées sont quasi inexistantes. Seules quelques exceptions subsistent, comme la production de la remplaçante de la Micra dans l’usine Renault de Douai et une collaboration limitée sur le marché indien.
Une opportunité stratégique pour Renault
Un rapprochement entre Nissan et Honda pourrait accélérer la stratégie de désengagement de Renault vis-à-vis de son allié historique. Depuis un an, Renault a réduit progressivement sa participation dans Nissan, passant de 43,4 % à 35,71 % aujourd’hui. Toutefois, la faiblesse actuelle de l’action Nissan — en chute de 40 % depuis début 2024 — complique les nouvelles cessions de titres. La fusion avec Honda pourrait renverser cette situation.
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Mercredi, l’annonce d’une possible fusion a fait bondir le cours de l’action Nissan de 23 %, redonnant une valeur plus attractive à la participation de Renault. Une telle opération faciliterait la conversion des actions Nissan en liquidités, un atout crucial pour le constructeur français, qui souhaite financer ses investissements dans les technologies électriques et numériques.
Un scénario de fusion aux nombreux atouts
Selon les analystes de Jefferies, une fusion Nissan-Honda pourrait offrir plusieurs avantages à Renault :
- Valorisation accrue des actions Nissan détenues par Renault, avec la possibilité de vendre à un meilleur prix.
- Poursuite de collaborations stratégiques, notamment en Europe, où Honda pourrait devenir un partenaire clé dans les usines Renault.
- Une potentielle opportunité pour Honda de devenir client d’Ampere, la division électrique de Renault.
En outre, le groupe français pourrait utiliser un mécanisme d’échange de participations. Par exemple, Renault pourrait échanger ses 15 % restants dans Nissan contre les 15 % que ce dernier détient dans son capital. Une telle stratégie permettrait à Renault d’annuler cette part de son capital, simplifiant davantage sa structure financière.
Le projet de fusion Nissan-Honda, qui pourrait inclure Mitsubishi, répond à plusieurs enjeux majeurs pour les acteurs japonais : lutter contre Tesla et les constructeurs chinois, mutualiser les ressources et éviter un rachat potentiel de Nissan par le géant technologique Foxconn. Si ce projet voit le jour, le nouvel ensemble atteindrait une production annuelle de plus de 8 millions de véhicules, se hissant dans le top 3 mondial.
À Tokyo, l’annonce a déjà fait des vagues. Tandis que l’action Nissan s’envolait (+23,7 %), Honda a vu son titre reculer de 3 %, traduisant les incertitudes sur les termes exacts de cette fusion.
Renault en position d’observateur privilégié
Pour Renault, cette fusion représente une fenêtre d’opportunité sans renoncer à certaines collaborations stratégiques en cours. Les analystes estiment que ce rapprochement pourrait transformer Nissan en un allié indirect, via Honda, tout en permettant à Renault de se concentrer sur ses partenariats européens et asiatiques. Interrogé sur le sujet, le groupe français a toutefois choisi de ne pas commenter.
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