L’immense majorité des analystes aujourd’hui se contente paisiblement d’annoncer un ralentissement économique, avec éventuellement (pour ceux qui ne sont pas directement haussiers !) un modeste supplément de correction de 10 % sur les indices avant que ceux-ci ne reprennent leur hausse.
Pourtant tous les indicateurs économiques que je suis, qui ont prévu correctement et sans faux signaux les récessions des dernières décennies, sont en mode « alerte rouge », et annoncent de façon claire l’arrivée d’une forte récession et d’un marché baissier :
Les conditions d’achat de biens durables aux USA s’effondrent :
Graphique : Université du Michigan
La courbe des taux est profondément inversée, ce qui signifie que les taux à court terme sont supérieurs aux taux à long terme, c’est sans doute l’indicateur de récession le plus fiable qui existe aujourd’hui en macro-économie :
Et les stocks de logements neufs à vendre sont en train d’exploser à la hausse aux USA (malgré une baisse temporaire le mois dernier), annonciateurs d’une crise sévère du secteur immobilier. Là aussi c’est un indicateur de récession particulièrement efficace :
(graphiques : fred research)
Les récessions apparaissent en grisé sur ces indicateurs (j’en ai d’autres, qui annoncent le même message), et vous constaterez que la situation actuelle est très claire, et que le signal de récession est puissant et sans ambiguïtés.
Donc le scénario le plus probable de loin à mon avis pour les mois et trimestres à venir est celui d’une récession importante aux USA et en Europe, associé à un marché baissier majeur, avec pour les USA un scénario de ce type, qui pourrait amener d’ici 18 mois le SP500 US à perdre environ 50% par rapport à ses niveaux actuels pour effacer sept ans de hausse. Je vous donne ci-dessous ma vision générale illustrée par un décompte elliottiste (je n’ai pas détaillé les sous-vagues).
(graphique : investing.com)
Les indices européens suivraient dans ce scénario au moins en partie les USA, même si ils sont clairement moins surévalués que leurs homologues US et que leur baisse pourrait être moins sévère.
graphique :Yardeni.com, PER prévisionnels pour les USA (en vert) et l’Europe (en bleu).
Dans ce scénario, nous sommes sur le point d’entrer dans le cœur du marché baissier (dans les mois à venir), après une vague d’avertissement qui a eu lieu au premier semestre 2022 et un possible rebond technique très temporaire (vague elliottiste C.2) sur les semaines à venir.
Le thème central de cette vague d’avertissement était les craintes inflationnistes, le thème central du cœur de crise sera au contraire celui de la récession elle-même (les craintes inflationnistes reculant temporairement sous l’effet de la baisse du cours des matières premières et du fret, déjà bien enclenchée).
Les banques centrales sont malheureusement en train aujourd’hui de sur-réagir à une inflation passée avec des hausses de taux très rapides, alors que les prix à la production, situés en amont de l’inflation finale pour le consommateur, sont déjà en train de baisser sensiblement et annoncent une baisse future de l’inflation (sans avoir besoin pour cela de plus de hausses de taux).
Cette sur-réaction des banques centrales risque donc d’aggraver la progression vers une récession qui est déjà quasiment inéluctable.
Que faire dans une telle situation ?
Soyez d’abord conscients qu’un marché baissier et une crise économique ne sont pas une mauvaise chose en soi pour un investisseur qui en est conscient et averti à temps : Ce sont avant tout des accélérateurs d’opportunités !
Pendant la crise vous pouvez par exemple envisager des positions baissières sur indices, ou bien avec moins de risques : placer votre trésorerie en dollars US (via des sicav monétaires par exemple). 2008 a ainsi été une de mes meilleures années en bourse grâce aux positions baissières !
Le dollar est une devise avec de mauvais fondamentaux sur le long terme, mais capable de tirer profit à court-moyen terme d’une situation de cœur de crise pour la seule raison que c’est la devise de réserve mondiale, qui est celle utilisée pour régler les dettes. Et c’est précisément pendant les crises qu’on liquide les dettes !
Ensuite, le marché baissier, si il a bien lieu, va libérer des opportunités d’investissement nombreuses et d’excellente qualité, que vous rencontrerez rarement dans votre carrière d’investisseur. Vous aurez en fin de crise des opportunités de gains inhabituelles et « hors-normes » que vous pourrez saisir grâce à vos liquidités !
Ce que je vous conseille donc pour « aborder le choc » d’une bonne façon :
Je n’irai pas jusqu’à recommander « 100% » comme en 2008 parce que contrairement à la situation de début 2008, nous avons cette fois une série de secteurs proches d’un bas de cycle et « achetables » (alors que ce n’était pas le cas pour le début 2008 où tous les secteurs étaient plus ou moins proches d’un haut de cycle simultanément).
Ces secteurs en bas de cycle étaient l’objet de mon précédent article sur ABC Bourse.
Ceci pourra se ventiler de la façon suivante :
Vous pourrez détenir ou constituer progressivement une poche d’actions décotées (jusqu’à 50%) qui présentent des caractéristiques défensives particulières, en privilégiant les secteurs aujourd’hui en bas de cycle : Si les marchés US sont trop chers et très exposés à la récession, je vous ai expliqué que d’autres sont au contraire bon marché !
PER moyen des actions de l’Europe de l’Est et de l’Amérique latine, courbes en bleu et jaune, graphique : yardeni.com
Ce que vous devez par contre vendre sans hésiter dans le contexte actuel (si vous êtes encore exposé, à la faveur du prochain rebond technique si possible), un marché baissier n’est pas un évènement à prendre à la légère :
- Tout fonds ou tracker corrélé aux grands indices, en particulier les indices US.
- Toutes les valeurs de croissance chères, en particulier les grandes valeurs technologiques, les valeurs orientées « énergies renouvelables » (ou tout autre secteur à la mode avec des ratios de valorisation élevés).
- Les assurances vie ou fonds généralistes, qui sont aussi corrélés aux indices boursiers généraux.
- Toute action ne présentant pas des caractéristiques de décote et des « parachutes défensifs » vraiment clairs et indiscutables. J’expliquerai dans un article à venir quelles sont ces caractéristiques.
Les derniers articles de Loïc Abadie |